Un poteau , une vache, un poteau, une ferme, un troupeau , un tracteur, un oiseau, une ferme... Je suis dans un train, je m'appelle Manuel et je rentre chez moi.
C'était bien, cette
colonie
. J'ai fait du
canoë
et du cheval, deux
activités
que l'on ne
pratique pas souvent dans mon
quartier
.
Le cheval, c'est pas
commode
. On ne s'assoit pas dessus comme sur un
tabouret
.
Il faut l'
amadouer
l'animal ! Mon cheval s'appelait « Chico », il sentait bon et je l'aimais beaucoup. Lui ne me détestait pas... Le matin, quand je lui
rendais visite
à l'
écurie
, je
devinais
son
humeur
au premier regard. Par exemple, s'il frappait des
sabots
en
remuant la tête
, je savais qu'il était énervé. C'était son
langage
et, finalement, on
se comprenait
bien tous les deux.
Enfin, tout ça c'est du passé. Maintenant, je suis dans le train qui me ramène chez moi. La nuit est tombée. Par la fenêtre, je ne vois plus rien, mais, dans la vitre, je distingue le reflet de mes copains.
On a tout fait pour être dans le même compartiment. Tour à tour, on a supplié les « monos » en promettant d'être sages.
Finalement, pour avoir la paix, ils nous ont mis ensemble et ont fermé la porte.
Au début du voyage, on a fait la java. On chantait à tue-tête les plus mauvaises chansons, surtout celles qui énervent les filles.
On frappait dans nos mains jusqu'à en avoir mal. De temps en temps, un mono se risquait dans notre compartiment. Il arrivait en criant un bon coup et, comme on l’aimait bien, on faisait semblant d’avoir peur…
Mais vers cinq heures, après le goûter, Gaël a parlé de la rentrée. D'un coup, ça nous a calmés. Tous en même temps, on a réalisé que les vacances étaient finies.
La douche froide !
Heureusement, je vais retrouver Jonathan, mon meilleur ami. Nous habitons dans le même immeuble, lui au deuxième étage et moi au sixième. Nous avons une passion commune pour les fourmis et élevons chacun notre fourmilière en secret. Les parents ne sont pas au courant.
L'an dernier, Jonathan m'a donné une jeune reine avec sa cour de petites ouvrières.
J'ai installé les fourmis dans une bouteille en verre, remplie de sable et de terre, que j'ai cachée dans un coin de ma chambre.
Pour les nourrir, je leur dépose des miettes de pain, des petits bouts de sucre... Mais elles se débrouillent bien toutes seules !
À force de se balader dans l’appartement, elles ont fini par atteindre la cuisine. Depuis, elles s'y sentent à leur aise et font des dégâts du côté des étagères. D'ailleurs, j'espère qu'elles sont en forme et que personne n'a découvert leur existence pendant mon absence !
Le train ralentit. Les lumières de la ville attirent mon attention. Puis, de nouveau, c'est l' obscurité et des phares cisaillent la nuit noire. Maintenant, j'ai envie d’arriver. On croise un train qui part. Nous, on rentre chez nous.
Il est temps de dire au revoir aux copains.
- Passe-moi ton adresse ! On s'écrira...
On se tape dans les mains et dans le dos pour éviter de pleurer comme des filles. Mais on est tristes de se quitter.
Sur le quai, je prends ma tête d'enfant sage qui plaît bien aux parents. Courageusement, je porte ma valise. Je commence à regretter d'avoir ramené ces morceaux de quartz. Ils pèsent au moins une tonne !
Tout ça pour épater Jonathan...
Soudain, au milieu d'une foule bigarrée, j' aperçois ma mère, mon père et ma sœur Coline. Une bouffée de chaleur me réchauffe le cœur et je réalise à quel point ils m'ont manqué.
Dans la voiture, j'apprends que Coline est rentrée de colo deux heures plus tôt. Au premier feu rouge, je sais déjà tout sur ses meilleures copines, son stage de rollers et jusqu'à la couleur du maillot de bain de sa mono préférée...
Ma mère se tourne vers moi.
- Et toi, Manuel, comment était ta colonie ?
- C'était bien…
- Tu n'es pas très bavard, dis donc. Tu t'es ennuyé ?
- Non, non…
- Tu t'es fait des amis ?
- Oui, je...
- Moi, dans ma colo, j'avais plein de copines... commence Coline.
- Tu nous l'as déjà dit, ma chérie, l' interrompt gentiment ma mère.
- Maintenant, la parole est à Manuel, s'exclame mon père en me tendant par-dessus son épaule un micro imaginaire.
Après deux, trois hésitations, je me lance. Je leur raconte Chico, les baignades et les promenades. J'évite surtout de parler des descentes chez les filles en pleine nuit, des batailles au jet d'eau... Ils ne comprendraient pas.
Mon père alors m’interrompt :
- Vous étiez drôlement sages dans votre colonie. De mon temps, on faisait des descentes dans les tentes des filles ! Et je me souviens d'une bataille de polochons mémorable…
- Ah bon I s'écrie ma mère en riant, j'en apprends de belles !
- En tout cas, dis-je, la colo, c'est super !
- Oh oui! renchérit Coline, la colo, j’adore !
Puis elle entonne une chanson qu'elle a apprise cet été.
- Moi aussi je la connais !
Nous chantons ensemble un couplet, un refrain. Les parents nous écoutent en silence. Et puis, bientôt, ma mère commence à fredonner. Mon père, lui, nous rejoint deux refrains plus loin. C'est le chant des retrouvailles.